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Discussions

Les technologies utilisées en formation à distance sont encore aujourd'hui très variées. On continue de développer des réseaux régionaux et provinciaux (et maintenant national aussi) pour l'enseignement en temps réel, les nouveaux sites étant le plus souvent dotés d'équipements de vidéoconférence. En parallèle, la convergence des technologies vers l'ordinateur entraîne le développement de cours (ou même de programmes entiers) sur cédéroms ou sur Internet, cours en temps différé du moins pour le moment.

Qu'il s'agisse d'établissements d'enseignement face à face voulant migrer vers la formation à distance ou d'établissements enseignant déjà à distance en temps réel ou en temps différé, on ne peut nier qu'Internet est de plus en plus choisi en tant que moyen de télécommunication. Dans la population en général, la formation à distance par Internet est sans contredit la question la plus souvent abordée et même considérée comme la voie d'avenir. Certes, les discussions ayant eu lieu lors des audioconférences ont porté souvent sur la question de la formation par Internet. Mais, si certaines problématiques abordées sont particulières à ce mode de communication, d'autres sont cependant communes à la formation à distance en général. Dans ce qui suit, les informations et les idées émises par les intervenants sur le sujet d'Internet ont donc été réunies à l'intérieur d'une même section. Suivent des sections concernant les autres technologies puis d'autres considérations abordées par les intervenants.

Mais, avant même d'aborder la question des technologies, un incontournable en formation à distance, nous avons résumé les réflexions des intervenants sur la relation technologie-pédagogie. Si le résumé tient en un seul paragraphe, il est cependant le premier en ordre d'importance, les intervenants ayant tous sans exception abordé ce sujet pour en souligner l'intérêt.

La relation technologie-pédagogie

La question de la relation technologie-pédagogie en est une de prime importance ; les intervenants ont été unanimes à ce sujet. S'il y a d'une part constatation de la nécessité d'intégrer les technologies à l'enseignement et l'apprentissage, tous font part du risque qu'on ait tendance à "ajouter" ces technologies sans changer de paradigme, sans proposer aux étudiants de nouvelles façons d'apprendre, le risque de ne pas développer de nouveaux modèles mais simplement de revenir aux anciens modèles d'enseignement. La seule et unique raison qui devrait justifier l'utilisation des technologies en enseignement, c'est l'amélioration de la formation. Les réflexions, recherches et actions futures devraient nécessairement être orientées sur l'utilisation des technologies pour ce qu'elles apportent à la pédagogie, sur le développement de modèles d'ingénierie tenant compte du potentiel de chaque technologie, et surtout, éviter à tout prix de conformer les cours à une technologie quelle qu'elle soit.

Internet

L'usage qu'on fait du réseau Internet est très varié. Dans certains cas, les cours sont complètement médiatisés par Internet : contenu, activités d'apprentissage, communications avec les tuteurs et/ou professeurs, support administratif, etc. Dans d'autres cas, le contenu lui-même est disponible sur un autre "support physique" (ex. : manuel "papier", cédérom, etc.) et Internet est utilisé pour les activités d'apprentissage et les communications. Finalement, il arrive aussi qu'Internet ne soit utilisé que pour les communications (entre étudiants et tuteurs et/ou professeurs et pour l'envoi des travaux et de la rétroaction), le cours et les activités d'apprentissage continuant à être offerts par les moyens traditionnels (vidéoconférence, audiographie, audioconférence pour l'enseignement en temps réel ; papier, audio et vidéocassettes, pour l'enseignement en temps différé).

Les raisons qui amènent les établissements à utiliser Internet de façon plus intensive sont variées. On compte plusieurs avantages à ce média.

Tout d'abord, les technologies sont de plus en plus souvent une compétence essentielle dans un métier parce qu'on y utilise de plus en plus, par exemple, l'Internet ou le courriel. Or, les établissements d'enseignement ont la responsabilité de préparer les apprenants au marché du travail, ils se doivent donc d'offrir aux apprenants des environnements d'apprentissage leur permettant d'utiliser ces technologies pendant leur formation.

Pour les établissements enseignant déjà en temps différé, les cours sur Internet apparaissent comme une valeur ajoutée en ce qui concerne l'encadrement : rapidité de la rétroaction (économie de plusieurs jours de délais lors de l'envoi des travaux), bris de l'isolement des étudiants (en les mettant en lien entre eux par la création de forums de discussion), plus grande facilité à organiser des activités d'apprentissage en équipe.

De plus, l'utilisation d'Internet permet de combiner la conception de cours, l'utilisation des technologies et la recherche d'information. Il apparaît également que la mise à jour des cours est plus rapide comparativement aux autres médias d'enseignement en temps différé.

Finalement, si l'intégration d'Internet dans les cours peut faciliter les activités de recherche d'informations, elle pourrait également permettre à plus ou moins long terme la mise sur pied de bibliothèques virtuelles. Pour le moment, quelques établissements ont développé pour les apprenants des ateliers de recherche (recherche sur Internet mais également recherche en bibliothèque) et il existe parfois déjà des services communs de bibliothèque. À moyen terme, on envisage le développement de portails avec d'autres établissements et/ ou d'autres partenaires. À long terme, certains pensent même au développement d'une véritable bibliothèque virtuelle accessible à tous.

Si la diffusion de cours sur Internet semble comporter plusieurs avantages, elle n'est cependant pas exempte d'obstacles entraînant des problématiques qui pèsent lourd dans l'évolution future de l'enseignement à distance.

Le premier problème relève de la question des coûts de production. Un cours entièrement "en ligne" est en soi un cours en temps différé (ou asynchrone) avec son mode de conception ou de production qui implique des ressources diverses : spécialistes de contenu, infographistes, programmeurs, etc. Les coûts de conception sont donc élevés. Certes, la question de la rentabilité des cours en temps différé n'est pas nouvelle, mais les cours multimédiatisé et/ou en ligne font réapparaître la nécessité de se pencher sur le problème. On évalue actuellement que la production d'un tel cours coûte entre 125 000 $ et 160 000 $ (à titre de comparaison, un cours à distance entièrement à l'écrit coûte environ 50 000$). On admet que le niveau élevé du coût de production est peut-être dû en partie à la nouveauté du média. On pense qu'avec le temps, on développera des outils de conception qui permettront d'abaisser ces coûts. N'en demeure pas moins qu'il est difficile de rentabiliser de tels cours, du moins sans les vendre au plan international. De toute façon, Internet étant en soi un média sans frontières, ces mêmes cours sont déjà ou seront à court terme en compétition avec ceux d'établissements d'enseignement d'autres pays, établissements qui ont parfois une réputation enviable. Par exemple, entre un cours de finance dispensé par Harvard et celui d'un établissement canadien, lequel les apprenants choisiront-ils ? Cet autre aspect du problème amène certains à penser qu'il faudra sérieusement réfléchir aux domaines pour lesquels on pourrait être considérés comme étant des "spécialistes" et canaliser nos ressources dans ces domaines particuliers.

Le fait que les cours en ligne soient des cours en temps différé conduit aussi à toute la question de l'autonomie des étudiants. Ceux-ci doivent être capables de gérer leur temps et gérer leur apprentissage de façon assez indépendante. À prime abord, plusieurs d'entre eux peuvent avoir des difficultés à s'autodiriger. Il semble cependant qu'après un certain temps d'adaptation, ils parviennent à bien fonctionner dans de tels cours. De plus, dans la planification de l'encadrement, il faut prendre en considération que les besoins des clientèles des divers paliers d'enseignement peuvent varier. Par exemple, certaines clientèles peuvent avoir des besoins d'encadrement plus élevés, ce qui a un impact sur le rôle que doit assumer le tuteur et/ou professeur. Ou encore, les clientèles des divers paliers peuvent avoir des besoins plus ou moins pressants de forums de discussion.

Un autre problème à considérer est celui de l'accès aux technologies, lequel peut être envisagé sous deux plans. Premièrement, les cours en ligne entraînent nécessairement le besoin d'avoir accès à un ordinateur. Dans les cours prévus pour la formation individualisée et diffusés par les établissements offrant déjà de la formation en temps différé, on ne peut que constater que les apprenants n'ont pas tous un ordinateur ni accès à Internet. On admet donc qu'il faudra pendant quelques années encore que les cours en ligne coexistent avec les versions plus traditionnelles des mêmes cours. Du côté des établissements ayant plusieurs campus ou encore dans les régions où il existe des sites d'accès, le problème relève cette fois de l'importance du parc informatique et aussi de la compatibilité matérielle et logicielle des ressources informatiques. Les achats initiaux de matériel et de logiciels et les mises à jour demandent souvent des investissements massifs et doivent se faire en collaboration et avec l'accord des partenaires concernés. Le problème de l'accès aux technologies se pose aussi en termes d'infrastructures technologiques. Même aujourd'hui, la vitesse de transmission des données sur Internet, l'instabilité de cette vitesse, la capacité des modems, etc. mettent un frein non négligeable à la multimédiatisation des contenus. Les documents audio et vidéo sont difficilement utilisables à moins d'être prêts à accepter un niveau de qualité discutable. Pour le moment donc, ceux qui désirent utiliser images, sons, vidéos, ne serait-ce qu'en petits extraits, se tournent plutôt vers l'utilisation du cédérom, réservant Internet aux échanges d'informations et à la transmission des travaux et de leur rétroaction.

Finalement, reste l'obstacle de la compétence dans l'utilisation des technologies, problématique à considérer autant au niveau des apprenants qu'à celui des enseignants. Les uns comme les autres sont amenés à utiliser les navigateurs, le courrier électronique, les fonctions de recherche sur Internet, etc. mais n'ont pas toujours initialement les compétences pour le faire. Cela met en lumière la nécessité d'accorder aide et soutien. Plusieurs établissements ont mis sur pied des équipes de support technique pour les professeurs, équipes souvent destinées aussi à les assister dans le développement lui-même des cours.

Les autres technologies

Dans le cadre de leurs présentations, les intervenants ont largement fait part des diverses technologies qu'ils utilisent en enseignement à distance. La nécessité d'intégrer les technologies dans la formation, tout comme la question du coût d'utilisation des technologies et des infrastructures nécessaires ou le besoin de soutien technique aux utilisateurs sont des problématiques générales applicables non seulement à Internet mais aussi aux autres technologies d'enseignement et d'apprentissage. L'enseignement en temps réel demande le développement de sites d'accès et implique des dépenses importantes en équipements. Le développement des réseaux actuels a souvent été permis par l'obtention de subventions. Mais les coûts de diffusion de l'enseignement en temps réel sont élevés principalement à cause des coûts d'interurbains. Certes, ces coûts ont énormément diminué au cours des dernières années. Certains mentionnent que leurs dépenses en interurbains représentent moins du tiers de ce qu'elles étaient il y a quelques années. Cependant, elles continuent d'être le poste de dépenses principal et les établissements tentent continuellement de négocier des tarifs spéciaux avec les compagnies de télécommunications, sans grand succès semble-t-il. Les quelques compagnies qui seraient prêtes à offrir de bons tarifs ne veulent cependant desservir que les grands centres urbains, ce qui est de peu d'utilité pour les établissements d'enseignement à distance. À ce chapitre, le tarif qu'a obtenu le RNEUF applicable à l'ensemble du territoire du pays est particulièrement intéressant. D'autre part, ces coûts élevés peuvent difficilement être compensés par une augmentation de la clientèle au plan national et international. Effectivement, l'augmentation des coûts d'interurbains est bien sûr directement proportionnelle au nombre de sites participants. De plus, la simple question du décalage horaire complique les échanges.

Par contre, on continue à miser sur l'enseignement en temps réel. Effectivement, il permet des échanges plus directs et spontanés entre les professeurs et les étudiants, et chez les uns comme chez les autres plusieurs considèrent que ces échanges sont importants. Si certains établissements d'enseignement face à face et/ou d'enseignement en temps réel pensent se tourner vers le développement de contenus de cours sur Internet, on aimerait conserver la possibilité de contacts en temps réel. Il y aurait peut-être moyen de développer un modèle intégrant à la fois enseignement synchrone et enseignement asynchrone (par exemple avec un calendrier hebdomadaire d'interaction professeur-étudiants). Un tel modèle pourrait même faciliter la migration des professeurs de l'enseignement présentiel à la formation à distance.

Toujours est-il que les coûts de la formation à distance et de l'utilisation des technologies en enseignement combinés au marché restreint que représentent les francophones rendent très importants les partenariats de toutes sortes entre les établissements. Les partenariats avec les compagnies de télécommunications et de technologies diverses sont à considérer sérieusement dans le développement des infrastructures de communication.

Quant aux technologies "du futur", celles qui seront développées et testées dans les quelques années qui viennent, on peut mentionner la prépondérance des technologies sans fils pour les communications en régions éloignées et aussi les communications sur campus, ou même la communication bidirectionnelle par satellite. À cet égard, on peut remarquer que les réseaux existants de formation à distance et/ou les établissements utilisant déjà largement diverses technologies semblent être les laboratoires par excellence pour tester de nouvelles technologies d'enseignement.

Autres considérations

On peut remarquer que la problématique de l'intégration des technologies ne se limite pas à la formation à distance chez les établissements bimodaux. L'intégration des technologies à l'enseignement doit se faire autant pour la formation à distance que pour l'enseignement face à face. Cela signifie que les services mis en place pour appuyer les professeurs tout autant que les modèles pédagogiques et technologiques développés par ces établissements doivent répondre à la fois aux besoins des deux modes d'enseignement. Mais, qu'il s'agisse d'intégrer les technologies à l'enseignement ou de migrer de l'enseignement présentiel à la formation à distance, il semble parfois difficile d'inciter les membres du corps académique à développer leurs cours "autrement". On comprend en partie cette résistance et on croit que, pour y pallier, il est important de préparer adéquatement les professeurs pendant la période de transition en accordant un soutien aux niveaux technique et pédagogique. Du côté des étudiants, il faut savoir accorder un certain soutien technique mais aussi un soutien pour qu'ils apprennent à s'autodiriger.

On observe également que si plusieurs, enseignants ou autres, hésitent à s'impliquer en enseignement à distance, c'est qu'elle leur apparaît plus compliquée que l'enseignement présentiel. Pourtant, l'expérience acquise par les établissements d'enseignement en temps réel démontre que les professeurs s'adaptent rapidement et facilement à ce nouveau mode d'enseignement. Les étudiants aussi semblent s'adapter rapidement à ce mode d'apprentissage et deviennent rapidement autonomes et impliqués fortement dans leur apprentissage.

Les intervenants insistent finalement sur l'importance des alliances interinstitutionnelles, des échanges de cours et le développement de cours en partenariat, lesquels sont primordiaux pour assurer aux francophones l'accès à l'éducation. Le partage d'informations aussi est essentiel. On s'aperçoit que plusieurs personnes travaillent individuellement, que beaucoup de projets se développent au sein des établissements et dans les réseaux régionaux. Il existe définitivement des expertises dans la communauté francophone du pays, expertises qui relèvent tout autant de l'utilisation des technologies que de la pédagogie de la formation à distance. Il faut favoriser la circulation des informations sur ce qui se fait et ce qui existe, la communication avec ceux qui font des démarches, l'échange des réflexions sur les apprentissages pédagogiques.

 

Rapport

© 1998-2002 REFAD

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Mise à jour: 4/3/2002